Peut-on savoir ignorer
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Un début de problématisation ...
SUJET : Peut-on savoir ignorer ?
Connaissances à avoir …
Les
sujets de type « Peut-on… ?»
Le
sujet invite le candidat à s’interroger sur la possibilité mais aussi sur la légitimité de faire ou ne pas faire telle ou telle chose.
La dissertation doit toujours ĂŞtre la
démonstration construite de l’idée directrice qui a été dégagée à partir du sujet.
Ce qu’il ne faut surtout pas faire :
1. Il ne faut pas surtout pas affirmer dans un premier
temps « oui, on peut… », puis dans un second
temps « non, on ne peut pas… », et éventuellement dans un troisième
temps « on peut peut-être… ».
2. Il ne faut pas vous contredire au cours de votre développement.
La dissertation ne doit jamais être construite sur le mode d’un plan :
« oui-non-peut-être».
Ce qu’il faut faire :
1. Il faut que vous interroger sur la capacité, c'est-à -dire la faculté de faire ou de ne pas faire quelque chose. Il faut vous poser la question « a-t-on la possibilité de… ? »
2. Il faut que vous interroger sur la légitimité de faire ou de ne pas faire quelque chose. Il faut vous poser la question « a-t-on le
droit de… ? »
3. Il faut se défier de l’exigence subjective. Pour répondre à l’exigence de vérité, il faut penser quelque chose qui vaille pour tout autre qui accepte de penser aussi selon cette exigence.
Il faut penser en accord avec soi-mĂŞme
Le savoir face Ă la croyance, l'enthousiasme et l'empirisme
A côté de l'érudition sans méthode, il nous faut indiquer les autres caractéristiques des trois autres formes d'obscuran¬tisme du savoir que nous avons annoncées suivant la lecture de Condorcet proposée par Catherine Kintzler, la croyance, l'enthousiasme, l'empirisme vulgaire.
Le savoir a pour antonymes l'ignorance et l'opinion, mais aussi la croyance. Est visée, sous ce terme, toute forme d'adhésion aveugle incapable de produire ses raisons ou même, plus gravement, qui récuserait principiellement toute rationalité. La croyance n'est pas l'ignorance mais elle peut en être le masque.
Ainsi, la mystique du chef ou du parti dans l'espace poli¬tique, le fanatisme dans l'espace religieux symbolisent l'esprit de soumission alors qu'il n'y a de
raison que dans la liberté. Condorcet s'en prenait polémiquement à la figure du prêtre coupable à ses yeux d'exiger la soumission à la révélation et au mystère contre toute utilisation de la raison. Plus nuancé et plus précis, Kant, dans l'opuscule sur les Lumières déjà cité, observait que le prêtre en tant qu'homme d'Église devait faire un usage privé de la raison, c'est-à -dire limité aux exigences de sa fonction. En effet, toute
société humaine repose sur des ins¬titutions dans lesquelles chacun n'est pas libre d'agir ni même de penser à sa guise. L'officier de l'armée, le fonctionnaire des finances, le prêtre de l'Église, par exemple, remplissent une fonction pour laquelle ils sont nommés et dont ils doivent res¬pecter les finalités en exécutant les missions qui leur sont confiées suivant une règle que Kant résume sèchement.
L'officier dit : « Ne raisonnez pas, exécutez ! » Le financier : « Ne raisonnez pas, payez ! » Le prêtre : « Ne raisonnez pas, croyez»'
L'agent institutionnel, le fonctionnaire font usage de leur
raison dans l'exercice de leur activité, mais c'est un usage que Kant appelle « privé » car ils ne discutent pas les principes de l'institution au nom desquels ils agissent. L'usage privé de la
raison signifie simplement que le fonctionnaire n'est pas une machine et que, par conséquent, il accomplit sa tâche avec intelligence. Ajoutons, pour prolonger la réflexion de Kant, que le membre d'une institution qui désavouerait sa cons¬cience, comme on dit aujourd'hui, n'est pas tenu d'y demeurer
Mais, dès lors qu'ils acceptent leurs fonctions, les militai¬res doivent obéir, les financiers, collecter les impôts, et les prêtres, inviter à croire'. Cependant chacun est aussi un citoyen et à ce titre (c'est-à -dire hors de toute fonction éventuelle) peut faire un usage public de la
raison et discuter le bien-fondé de toute institution et des principes qui la régissent. C'est ce cadre général qui per¬met à Kant de différencier l'attitude croyante et l'attitude savante. Et dans l'opuscule Qu'est-ce que les Lumières ?, c'est uniquement l'exemple du prêtre qui sera développé : l'usage public de la
raison est « celui que l'on en
fait comme savant devant l'ensemble du public qui lit ». Kant veut signifier par là que les croyants, et au premier chef les membres du clergé, jouissent d'une
liberté sans bornes d'user de la
raison devant la communauté des lecteurs, c'est-à -dire de ceux qui sont suffi¬samment instruits pour participer à la « communauté savante ». Aucune croyance ne saurait limiter le savoir. Chaque citoyen, et particulièrement le prêtre en sa qualité de « savant », dispose de « la
liberté de formuler des remarques sur les vices inhérents à l'institution actuelle ». La croyance qui ne serait pas éclairée par le savoir serait ignorance, comme la
religion qui refuserait la
raison serait superstition'.
4 L'enthousiasme, étymologiquement la « possession di¬vine », a d'abord été un terme de la
langue philosophique,
1. Précisons que l'approfondissement continu de la démocratie et de la laïcité permet à tout fonctionnaire de refuser un ordre illégitime sans avoir à quitter l'institution qui l'emploie. Pour parler le
langage de l'opuscule de Kant, cela signifie que l'usage privé de la
raison ne saurait contredire gravement son usage public.
2. Ajoutons d'ailleurs que c'est une constante du christianisme de revendiquer un lien entre la rationalité et la Révélation, et de condamner le fidéisme, c'est-à -dire la tentation d'abandonner la foi aux
sentiments et d'en exclure tout effort d'Ă©lucidation rationnelle.
Nous n'avons évidemment pas prétendu proposer ici une présentation globale de la croyance dans le cadre du kantisme. Bornons-nous ici à faire une remarque sur la célèbre affirmation de la préface à la seconde édition de la Critique de la
raison pure: « J'ai donc dû supprimer le savoir pour lui substituer la croyance. » Par « savoir » ( Wissen), l'auteur ne désigne pas la science ( Wissenschaft), mais le dog¬matisme métaphysique. Il s'agit de circonscrire les limites du savoir pour laisser se déployer la foi rationnelle de la
raison pratique qui offre Ă la
volonté le moyen de déterminer la loi de l'agir moral.
utilisé péjorativement pour décrire une attitude privilégiant une adhésion irrationnelle. En effet
communiquer ou recevoir un savoir par enthousiasme, c'est-à -dire par un mécanisme purement affectif, c'est priver celui-ci de sa structuration rationnelle. Condorcet ne récuse pas tout usage de l'enthou¬siasme car il ne s'agit pas dans son
esprit d'une opposition frontale entre le savoir acquis par les voies rationnelles et celui acquis par les seules forces de la
passion ou de l'ima¬gination. La raison, une fois convaincue, est fondée « à se laisser entraîner » à l'enthousiasme. Le danger vient évidem¬ment d'une adhésion donnée à un savoir uniquement par simple contagion émotionnelle. Socrate s'en méfiait lorsque, contre Polos et Gorgias, il rappelait dans le Gorgias les règles du savoir rationnel contre celles du savoir sophistique et refu¬sait en particulier que l'émotion pût l'emporter sur la
raison (473 c-d)'.
De mĂŞme qu'un savoir issu de la croyance peut ĂŞtre conforme Ă la
vérité (l'autorité à laquelle on s'en remet dis¬pose d'un authentique savoir), un savoir acquis sous l'effet de l'enthousiasme peut être
vrai mais, comme l'indique Condor¬cet : « Une fois excité, il sert l'erreur comme la
vérité ; et dès lors il ne sert réellement que l'erreur, parce que sans lui, la
vérité triompherait encore par ses propres forces. »2
La distinction entre conviction et persuasion est ici éclai¬rante. La première est le signe d'une adhésion liée à la raison, la seconde d'une adhésion liée à l'émotion. Kant de son côté observait que notre conviction est fondée sur des raisons objectives, alors que dans le cas de la persuasion nous ne savons pas si notre assentiment repose sur des raisons subjec¬tives ou des raisons objectives'.
L'empirisme vulgaire réduit le savoir à ses applications pratiques. Soucieux d'efficacité pratique à court terme, il défend un « obscurantisme pragmatiste ». C'est là une erreur
Le principe de réalité
Selon Freud, toute
vie psychique est constituée par une tension entre le principe de plaisir et le principe de réalité. Le principe de plaisir est celui qui nous pousse à réaliser nos désirs, le principe de
réalité celui qui nous oblige à composer avec la
réalité telle qu'elle est. L'inconscient est tout entier soumis au seul principe de plaisir : pour lui, il n'y a pas de différence entre désirer une chose et la voir se réaliser. On ne rêve pas qu'on souhaite faire quelque chose, on rêve qu'on le fait. La
vie consciente, elle, a pour difficile tâche de concilier le
désir et la réalité. Vivre, c'est ins¬crire ses
désirs dans une
réalité qui n'était pas faite pour les accueillir.
D'après Nietzsche, l'homme est pour le moins enclin à confondre son besoin de croire à quelque chose avec une quête de vérité. En effet, « croire, c'est tenir pour
vrai ». Or, pour vivre et pour agir, nous avons sans cesse besoin de croire. Ce que nous appelons «
vérité », ce sont donc les croyances dont nous avons besoin, en tant qu'individus ou en tant qu'espèce. La
vie se nourrit d'illusions vitales, de croyances auxquelles il nous faut croire, non parce qu'elles sont vraies, mais parce qu'elles sont nécessaires à la vie. Il se pourrait donc que l'idée même de
vérité soit notre plus ancienne erreur, notre seule erreur. Elle nous conduit, depuis Platon au moins, à disqualifier le témoignage de nos sens pour chercher, derrière les apparences, un « monde
vrai », une vérité. C'est pourquoi Nietzsche peut s'écrier : « l'art a plus de valeur que la
vérité », parce que l'art nous désapprend à aller chercher derrière les apparences, il nous réapprend à jouir des apparences sans rien aller chercher au-delà . Si la
vie est un pur jeu avec les apparences, alors l'art seul lui est fidèle, plus que la science ou la philosophie. « L'art au ser¬vice de l'illusion voilà notre culte ! » (Nietzsche) •
Problème : Du point de vue de la
connaissance l’homme a plus besoin de savoir que d’ignorer
« Le peu que je sais, c'est à mon ignorance que je le dois » (Sacha Guitry, Toutes réflexions faites, Cinquante ans d'occupations, Omnibus, Presses de la Cité, 1993, p.82).
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Citations sur Peut-on savoir ignorer :
Il y a trois sortes de savoir : le savoir proprement dit, le savoir-faire et le savoir-vivre ; les deux derners dispensent assez bien du premier. -
Charles Maurice de Talleyrand-PĂ©rigord
Que de choses il faut ignorer pour agir» ! -
Paul Valéry
L'ennemi doit ignorer ou je compte livrer bataille... -
Sun Tzu
Mieux vaut être ignorant que d’ignorer la vérité. -
Zengdar
Si l'on n'a pas visité deux marchés,on ne peut pas savoir lequel est le meilleur. -
Proverbe mossi